« On ne peut m'habiller, me coiffer, m'aimer avant de me laisser dans le noir, on ne peut me délaisser, me déchirer, m'abimer avant d'arrêter mon cœur. Je ne suis pas une poupée. Je ne suis pas un jouet. »

Fille d'un célèbre bijoutier Coréen et d'une publicitaire Japonaise reconnue, Reina n'aurait jamais du prononcer ces phrases, pas même une seule fois. La richesse et la célébrité auraient du la protéger, le premier né de la famille aussi, c'est ce qu'on pourrait se dire, mais à quoi bon croire que l'argent maintient les problèmes hors de portée ? Dès sa naissance, le sort sembla vouloir frapper sous la forme d'une maladie qu'elle garderait à vie, l'asthme, et la petite princesse ne vit pas de fées se pencher par-dessus son berceau. Non, tout ce qu'elle vit durant son enfance, ce fut cette ombre effrayante qui pointait le bout de son nez dans les occasions les plus impromptues, sa première grosse crise parmi tant d'autres étant arrivée après avoir été poussée par ses camarades dans la cours de l'école à la fin de la primaire. Rien de grave, selon une majorité des parents. Le début d'un enfer aux yeux de l'enfant pour qui les jours empirent dès son entrée au collège, avec ses critères d'acceptations et les crises d'adolescence. En parler à quelqu'un ? Pas la peine. A cette époque, la brune est incapable d'en piper mot et subit moqueries et violences sans réagir, se faisant balloter d'un groupe à un autre, servant d'esclave à l'un, de punching-ball à l'autre. Sans grand frère pour la protéger, trop occupé à gérer ses hormones abusives grâce à ses six ans de plus, sans parents pour voir ses bleus lorsqu'elle rentrait puisqu'eux-même n'étaient presque jamais à la maison. Sans rien d'autre à faire que pleurer en se recroquevillant, en priant pour que ça s'arrête. Pour que tout s'arrête.

Pour autant, au-delà des crises de plus en plus inquiétantes qui finissent même par la mener, à la fin du collège, à l'hôpital, au-delà même des mauvais tours et des coups, la Japo-Coréenne reste une bonne élève, si ce n'est la meilleure de sa classe. Une excuse en plus pour se faire maltraiter, vous vous en douterez, mais qui aurait cru qu'il y aurait assez de courage dans cette petite chose pour continuer bravement à étudier ? Une fois entrée au lycée, un autre monde l'attend, et c'est à peine si elle ouvre la bouche pour parler aux autres, passant pour une fille froide et inintéressante, tentant tant bien que mal de ne plus attirer les regards. Finie, la notoriété du nom, les enfermements en classe une fois la nuit tombée, les amis aussi : Plus personne ne peut l'approcher, son histoire l'ayant transformée en véritable muraille dont la confiance s'est pourtant effritée. Quiconque tente de l'approcher se voit refouler d'entrée de jeu, et plus d'une personne se sont retrouvées à laisser tomber, faute de lui trouver une quelconque excuse pour avoir un pareil caractère. Mauvaise pioche, alors que Reina n'a jamais été particulièrement méchante, ni même arrogante malgré son statut dans la société.

C'est à ce moment-là, lorsque petit à petit la tempête se calme pour ne laisser place qu'au grand large, que la jeune fille commence enfin à s'ouvrir. Petit à petit, au début, une couche après l'autre, prête à tout moment à retourner dans son mutisme comme une huitre le ferait dans sa carapace. Elle commence à parler, à se faire de connaissances, à se socialiser à nouveau en mettant de côté sa peur que le cauchemar recommence, puis elle fini par sortir. En groupe au début, pour ne pas risquer un accident lié à ses antécédents, puis seule, ses soirées passant rapidement d'un soir par semaine à cinq, voir six, ne lui laissant qu'un jour de véritable repos et d'étude. Heureusement pour elle, malgré les protestations assez vive de ses parents, elle est loin d'être idiote et sait très bien quand s'arrêter si elle rencontre quelque difficulté, et c'est ainsi qu'elle obtient son diplôme avec mention et félicitations du jury des examens, ce qui calme légèrement le jeu à la maison. Décidée à suivre les pas de sa mère, modèle parmi tous entre son élégance et sa passion, Reina décide d'entrer à l'université en section marketing et, de par le respect de sa double nationalité, UmiSeom devient son premier et unique choix, bien décidée à ne pas échouer. Aujourd'hui, encore un peu mal à l'aise de son nouveau statut, elle fait partie de l'élite de l'université, que ce soit entre sa popularité, ses notes, sa gentillesse et sa famille et, si elle a du mal à s'y faire avec les trois années d'études précédentes, elle sait qu'elle n'est pas seule. C'est, au fond, tout ce qui compte.